MO(T)SAIQUES 2

"Et vers midi
Des gens se réjouiront d'être réunis là
Qui ne se seront jamais connus et qui ne savent
Les uns des autres que ceci : qu'il faudra s'habiller
Comme pour une fête et aller dans la nuit ..."

Milosz

lundi 31 octobre 2011

P. 85. Est-ce ainsi que chantaient Barbara, Charlebois, Ferré, Leclerc, Léotard, Vigneau ???

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Quand les hommes vivront d’amour,
paroles et musique de Raymond Lévesque

- "Quand les hommes vivront d'amour
Il n'y aura plus de misère
Et commenceront les beaux jours
Mais nous, nous serons morts mon frère

Quand les hommes vivront d'amour
Ce sera la paix sur la Terre
Les
soldats seront troubadours
Mais nous, nous serons morts mon frère

Dans la grande chaîne de la vie
il fallait que nous passions
Où il fallait que nous soyons
Nous aurons eu la mauvaise partie

Quand les hommes vivront d'amour
Il n'y aura plus de misère
Peut-être song'ront-ils un jour
A nous qui serons morts mon frère

Mais quand les hommes vivront d'amour
Qu'il n'y aura plus de misère
Peut-être song'ront-ils un jour
A nous qui serons morts mon frère

Nous qui aurons aux mauvais jours
Dans la haine et puis dans la guerre
Cherché
la paix, cherché l'amour
Qu'ils connaîtront alors mon frère

Dans la grand' chaîne de la vie
Pour
qu'il y ait un meilleur temps
Il faut toujours quelques perdants
De la sagesse ici-bas c'est le prix

Quand les hommes vivront d'amour
Il n'y aura plus de misère
Et commenceront les beaux jours
Mais nous, nous serons morts mon frère

Quand les hommes vivront d'amour
Ce sera la paix sur la terre
Les
soldats seront troubadours
Mais nous, nous serons morts mon frère."




Robert Charlebois, Félix Leclerc et Gilles Vigneau, un 13 août 1974.

Est-ce ainsi que les hommes vivent ?
Poème d’Aragon, musique de Léo Ferré

- "Tout est affaire de décor
Changer de lit changer de corps
À quoi bon puisque c'est encore
Moi qui moi-même me trahis
Moi qui me traîne et m'éparpille
Et mon ombre se déshabille
Dans les bras semblables des filles
Où j'ai cru trouver un pays.

Coeur léger coeur changeant coeur lourd
Le temps de rêver est bien court
Que faut-il faire de mes nuits
Que faut-il faire de mes jours
Je n'avais amour ni demeure
Nulle part où je vive ou meure
Je passais comme la rumeur
Je m'endormais comme le bruit

C'était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d'épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j'y tenais mal mon rôle
C'était de n'y comprendre rien

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent

Dans le quartier Hohenzollern
Entre La Sarre et les casernes
Comme les fleurs de la luzerne
Fleurissaient les seins de Lola
Elle avait un coeur d'hirondelle
Sur le canapé du bordel
Je venais m'allonger près d'elle
Dans les hoquets du pianola

Le ciel était gris de nuages
Il y volait des oies sauvages
Qui criaient la mort au passage
Au-dessus des maisons des quais
Je les voyais par la fenêtre
Leur chant triste entrait dans mon être
Et je croyais y reconnaître
Du Rainer Maria Rilke

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent

Elle était brune elle était blanche
Ses cheveux tombaient sur ses hanches
Et la semaine et le dimanche
Elle ouvrait à tous ses bras nus
Elle avait des yeux de faïence
Elle travaillait avec vaillance
Pour un artilleur de Mayence
Qui n'en est jamais revenu

Il est d'autres soldats en ville
Et la nuit montent les civils
Remets du rimmel à tes cils
Lola qui t'en iras bientôt
Encore un verre de liqueur
Ce fut en avril à cinq heures
Au petit jour que dans ton coeur
Un dragon plongea son couteau

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent..."



Philippe Léotard, 1994.

Le mal de vivre,
Barbara

- "Ça ne prévient pas quand ça arrive
Ça vient de loin
Ça c'est promené de rive en rive
La gueule en coin
Et puis un matin, au réveil
C'est presque rien
Mais c'est là, ça vous ensommeille
Au creux des reins

Le mal de vivre
Le mal de vivre
Qu'il faut bien vivre
Vaille que vivre

On peut le mettre en bandoulière
Ou comme un bijou à
la main
Comme
une fleur en boutonnière
Ou juste à la pointe du sein
C'est pas forcément
la misère
C'est
pas Valmy, c'est pas Verdun
Mais c'est des larmes aux paupières
Au jour qui meurt, au jour qui vient

Le mal de vivre
Le mal de vivre
Qu'il faut bien vivre
Vaille que vivre
Qu'on soit de Rome ou d'Amérique
Qu'on soit de Londres ou de Pékin
Qu'on soit d'Egypte ou bien d'Afrique
Ou de
la porte Saint-Martin
On
fait tous la même prière
On fait tous le même chemin
Qu'il est long lorsqu'il faut le faire
Avec son mal au creux des reins

Ils ont beau vouloir nous comprendre
Ceux qui nous viennent les mains nues
Nous ne voulons plus les entendre
On ne peut pas, on n'en peut plus
Et tous seuls dans le silence
D'une nuit qui n'en finit plus
Voilà que soudain on y pense
A ceux qui n'en sont pas revenus

Du mal de vivre
Leur mal de vivre
Qu'ils devaient vivre
Vaille que vivre

Et sans prévenir, ça arrive
Ça vient de loin
Ça c'est promené de rive en rive
Le rire en coin
Et puis un matin, au réveil
C'est presque rien
Mais c'est là, ça vous émerveille
Au creux des reins

La joie de vivre
La joie de vivre
Oh, viens
la vivre
Ta
joie de vivre."


Barbara, Discorama : 20 février 1966.

Ne chantez pas la mort
Léo Ferré, paroles de Jean-Roger Caussimon

Ne chantez pas la Mort, c'est un sujet morbide
Le mot seul jette un froid, aussitôt qu'il est dit
Les gens du "show-business" vous prédiront le "bide"
C'est un sujet tabou... Pour poète maudit
La Mort !
La Mort !
Je la chante et, dès lors, miracle des voyelles
Il semble que la Mort est la soeur de l'amour
La Mort qui nous attend, l'amour que l'on appelle
Et si lui ne vient pas, elle viendra toujours
La Mort
La Mort...

La mienne n'aura pas, comme dans le Larousse
Un squelette, un linceul, dans la main une faux
Mais, fille de vingt ans à chevelure rousse
En voile de mariée, elle aura ce qu'il faut
La Mort
La Mort...
De grands yeux d'océan, une voix d'ingénue
Un sourire d'enfant sur des lèvres carmin
Douce, elle apaisera sur sa poitrine nue
Mes paupières brûlées, ma gueule en parchemin
La Mort
La Mort...

"Requiem" de Mozart et non "Danse Macabre"
(Pauvre valse musette au musée de Saint-Saëns!)
La Mort c'est la beauté, c'est l'éclair vif du sabre
C'est le doux penthotal de l'esprit et des sens
La Mort
La Mort...
Et n'allez pas confondre et l'effet et la cause
La Mort est délivrance, elle sait que le Temps
Quotidiennement nous vole quelque chose
La poignée de cheveux et l'ivoire des dents
La Mort
La Mort...

Elle est Euthanasie, la suprême infirmière
Elle survient, à temps, pour arrêter ce jeu
Près du soldat blessé dans la boue des rizières
Chez le vieillard glacé dans la chambre sans feu
La Mort
La Mort...
Le Temps, c'est le tic-tac monstrueux de la montre
La Mort, c'est l'infini dans son éternité
Mais qu'advient-il de ceux qui vont à sa rencontre?
Comme on gagne sa vie, nous faut-il mériter
La Mort
La Mort...
La Mort ?




Mais encore, sur le phonographe de ce blog : ICI.
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jeudi 27 octobre 2011

P. 84. Toponymie hautement provençale...

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Les Jasses (Ph. JEA/DR).


Du Bagne Lèbre au Vallon Mort 
en passant par les Trois Eves


Aven de la Resclave, de Maulicat, Joly,

Bagne Lèbre,

Bas Pied Royer,

Baumatrône, Beauviset, Belle Etoile,

Boulinette,

Champ de l’Hière,

Chante-Coucou,

Château de l’Isolette, de Mille, de Royas, des Granges, de Valigramme,

Clapasson, Clinclette,

Clouas de l’Estang,

Collet de Flaqueirol, de Griffon, de Rigor, de Rougier, de Tirail
Collet des Dix Ecus, des Mouttes, des Turcs,
Collet du Paradis,

Combe du Pommier,

Courre-Frac, Croumpadis,

Fourcadure, Fumeirasse,

Jas de Carretier, de Chauvin, de Désiré, de la Font, de la Zinzine, de Mazan, de Mourer, de Peyran, d’Estelle,

Derrière la Colle (Ph. JEA/DR).

La Barbeirasse, la Bastidonne, la Bidousse, la Blancharde, la Bonne Chère, la Bonnette, la Bounotte, la Bouquière, la Brûlade, la Buissonne,
La Cavalerie, la Croix Juive, la Cuculière,
la Déguine, la Dounde,
la Fayette Brûlée, la Figuière, la Font du Bès, la Frouste, la Fumeirasse,
la Gandi, la Garcine, la Gavotte, la Grande Gardette, la Grange des Davids, la Grosse Blaque, la Grassane, la Groupatassière,
la Haute Aramelle,
la Marine, la Mataroune,
la Lave, la Légremuse, la Lègue,
la Palantare, la Petite Pourraque, la Pinchinette, la Pintaronne, la Pourrachière,
la Ramade, la Riane, la Rochonne, la Roustagne,
la Saulce, la Saurette, la Serpatière,
la Tarlantane, la Tattie, la Tombe du Pin,

Le Boum, le Bout des Vignes, le Boy, le Brec,
le Cadet, le Chapeau Rouge, le Clapier, le Clos de Bourdin, le Coulet des Longs,
le Gourd de Brunière, le Goureyre, le Grand Jonc, le Grangeon, le Gros André,
le Haut Beauregard,
le Jardinier,
le Moulin Bec, de Lavon,
le Mourou,
le Pain Perdu, le Paraire, le Patière, le Petit Chavon, le Pétoue, le Plus Bas Villard, le Pointu, le Puits de Geay,
le Reclapous, le Réveillat,
le Siffleur, le Suif,
le Tombaréou, le Toti,
le Vicaire,

le Grand Garbeyon, Grand Tavernoure,

Caseneuve (Ph. JEA/DR).

les Agnels, les Astiers, les Athénoux, les Auberasses,
les Barbiers, les Bassaquets, les Baussiers, les Beauchères, les Blacouires, les Bois Roulans, les Bombouyes, les Boussicaux, les Bricolets,
les Cachots, les Cavaliers, les Chaffrets, les Chancelles, les Claparèdes, les Cordiers, les Coupiers, les Courbons, les Courdonnances, les Cours des Ormes, les Courtasses, les Cries, les Cypriens,
les Dauphins, les Dégoutaux, les Déribades,
les Elzéasses, les Encontres, les Escarpes, les Escoffiers, les Espatules, les Estourniaux, les Estropis, les Eves, les Eygaux,
les Farlins, les Fayolles, les Feautriers, les Finets, les Fondons, les Fouix, les Fournigons, les Frances, les Françonnets, les Fringants,
les Gavottes, les Gnouquettes, les Grandes Vaines, les Gravats,
les Héritiers, les Hermitans,
les Iscles,
les Jean-Jean, les Jonquiers,
les Larmets, les Lombards,
les Margarons, les Margouillons, les Mariaudis, les Marteaux, les Maures, les Médecins, les Méritants, les Moroux, les Mouères,
les Nouratons,
les Oules, les Ouvières de la Mère de Dieu,
les Patatonis, les Picards, les Portes de Castor, les Prayés,
les Rapugons, les Riperts, les Rouges,
les Peignets, les Petites Vaines, les Picatiers, les Piroublets, les Planasses, les Plantades, les Poupadouires,
les Santons, les Sauvans, les Savels, les Suaus,
les Tamisiers, les Tapets, les Trécassats, les Trois Eves,
les Valansanes, les Viaux,

St-Martin de Castillon (Ph. JEA/DR).

Montagnette, Montcolinne, Montfuron,

Notre Donne,

Pareloup, Passenguinel, Picon,

Pié Bousquet, de Marc, Cabrier, Conil, Douren, le Bréou,

Pierre Fiche,

Pissayre et Cameure,

Plaine de Canin, de l’Aureille,

Plan d’Aiguiou, des Agasses,

Poirière, Pompoulasse, Porchière,

Pré de Sire, Pré Redon,

Ravin de Bramadou, de la Fèdo Morto, de l’Agasson, de la Masque, de l’Ausselet, de la Birouette, de la Coquillade, de la Fresque, de Pégaresse, de Peire Grosse, de Pingenaud, de Roumagois, de Vaureillanne,
Ravin des Basses Courennes, des Ferriers, des Trois Collets,
Ravin du Devens, du Nid de l’Aigle, du Puits d’Engrenière, du Rossignol,

Reclapous,

Rocher du Coq, Rocsalière,

Saint-Castor,

Souchon de la Romane, Soulouri,

Taranchole, Tirecoui,

Tour d’Embarbe, de Nègre, de Malakof, de Thelme,

Trévieille, Triclavel,

Vallon de Battarel, de Paillère, de Torelli, de Vaunière,
Vallon des Avelaniers, des Piroublets, des Roumis,
Vallon Mort...

Vachères (Ph. JEA/DR).

Pour d'autres toponymies, cliquer : ICI.

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lundi 24 octobre 2011

P. 83. "Journal" de S. Pepys : octobre 1660

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Journal de Samuel Pepys,
Traduction de Renée Villoteau, Préface de Jean-Louis Curtis,
le temps retrouvé, Mercvre de France, 2007, 572 p.

Les extraits figurant sur cette page du blog portent en références la pagination de cette édition.

4e de couverture :

- "Il semble que Pepys n'ait eu d'autre désir que de se montrer respectable et qu'il ait tenu un journal pour montrer qu'il ne l'était pas, disait Stevenson. Samuel Pepys, haut fonctionnaire de l'Amirauté, écrivit son Journal de 1660 à 1669.
C'est un document inestimable sur les premières années de la Restauration en Angleterre.
Cromwell meurt en 1658 et, deux ans plus tard, le fils du roi décapité est couronné sous le nom de Charles II. Commence alors une période marquée par une grande réaction contre le puritanisme.
Pepys est un grand bourgeois respectable et comblé, mais son journal - insoupçonné de ses contemporains - révèle un autre personnage, viveur, jouisseur, ingénu et cynique, curieux de tout, de la Cour comme de la ville.
Source incomparable de renseignements sur la vie à Londres au XVIIe siècle, le Journal de Samuel Pepys présente avec vigueur, pittoresque et drôlerie, le portrait d'un ineffable excentrique."

L’Express :

- "Dix ans de la vie d'un haut fonctionnaire londonien sous le règne de Charles II. La restauration monarchique après Cromwell, la cour et la ville, l'essor d'une carrière, l'épouse et les maîtresses, des ennuis digestifs, l'amour de la musique, la peste de 1665, l'incendie de Londres en 1666. Un document saisissant de vérité. L'une des pierres angulaires de la civilisation britannique." 
(19 avril 2001).

Détail d'un portrait de Samuel Pepys par John Hayl - 1666 (DR).

Bolcho :

- "Très peu connu chez nous, mais il paraît que tout bon Anglais en possède un exemplaire dans sa table de nuit, entre la Bible et le pot de chambre (enfin, pour le pot de chambre, je ne suis pas sûr).
Pepys a écrit son Journal entre 1660 et 1669 et la grande originalité de cette oeuvre est qu'elle n'était pas du tout destinée à être publiée, au point qu'elle a été écrite en langage codé. Cela vous donne un ton d'une sincérité assez surprenante; l'homme ne se montre pas que sous son meilleur jour. Et pourtant, il est extrêmement attachant. Pepys est haut fonctionnaire à la Marine à Londres. On va vivre avec lui la Grande Peste de 1665, l'incendie de 1666 et la guerre contre la Hollande et la France par exemple. A côté de ces "reportages" de première main, on aura droit à tout ce qui fait la vie quotidienne de Samuel Pepys: sa femme qu'il adore (et toutes les autres qu'il bouscule goulûment), sa première consommation de thé en 1667 (eh oui, les Anglais ne l'ont pas toujours connu ce breuvage...), de chocolat chaud, de jus d'orange ("agréable, mais je me demandais si ça n'allait pas me faire du mal").
(...) Pepys est un grand curieux en matière scientifique. Il suit de près tous les progrès de l'époque (les lunettes d'approche, les premières transfusions de sang, les premières montres portables, les expériences sur la lumière, la discussion sur la génération spontanée, etc). Quelle époque !"
(Amazon.fr, critiques libres, 25 octobre 2001).

Première page "sténographiée" ou "encodée" du Journal. Samuel Pepys se protégeait ainsi des lectures indiscrètes (DR).

Pour voir pendre, écarteler et dépecer...

13 octobre 1660 :

- "Je suis allé à Charing Cross, pour voir pendre, écarteler et dépecer le major Harrisson (1); ce qui fut fait, le major paraissant d'aussi bonne humeur que peut l'être un homme en pareille circonstance. On le coupa en morceaux et l'on présenta sa tête et son coeur au peuple qui poussa de grands cris de joie. Ainsi, le sort a donc voulu que je visse décapiter le Roi (2) à Whitehall, et que je visse encore aujourd'hui, à Charing Cross, le premier sang versé pour le venger. De là chez Mylord, où j'ai retrouvé le capitaine Cuttance et M. Sephy pour aller des huîtres à la taverne du Soleil. Ensuite, par la rivière, chez moi où je me suis emporté contre ma femme qui laisse traîner ses affaires partout. Dans ma colère, j'ai brisé à coups de pieds le joli petit panier que je lui avais acheté en Hollande. J'en fus bien fâché ensuite. Passé l'après-midi à placer des rayons dans ma bibliothèque. Le soir au lit."
(P. 60).

15 octobre :

- "Ce matin, M. Carew (3) a été pendu et écartelé à Charing Cross. Par faveur extraordinaire, ses membres ne seront pas exposés.
(...)
J'ai très mal dormi cette nuit parce que ma femme avait le nez bouché, ce qui la faisait ronfler. C'est la première fois que cela lui arrive."
(PP. 60-61).

19 octobre :

- "Au bureau. Ce matin, on a terminé l'installation de ma salle à manger : tentures de serge verte et cuir doré. Ce matin, Hacker et Axtell (4) ont été pendus et écartelés, comme tous les autres. Ce soir j'ai veillé tard pour préparer les comptes de Mylord. Je m'aperçois qu'il me doit plus de quatre-vingt livres. Cela fait plaisir à voir et j'en remercie Dieu."
(P. 61).

20 octobre :

- "Cet après-midi, en allant chez mon tapissier, à Saint-Bartholomé, je vis les membres des traîtres, récemment mis à mort, exposés à Aldersgate. Triste spectacle. Nous venons de passer deux semaines sanglantes. il n'y a pas eu moins de dix personnes pendues et écartelées. A la maison, et, après avoir écrit à mon oncle, au lit."
(P. 61).

Samuel Pepys (5) : Ex libris (DR).

21 octobre (jour du Seigneur) :

- "Nous sommes allés à la taverne de la Couronne. En passant devant chez lui, Georges Vines m'a fait monter en haut de sa tourelle, d'où j'ai vu la tête de Cook et celle d'Harrisson, exposées chacune d'un côté du palais de Westminster, en châtiment de leur trahison. De là-haut, j'étais très bien mis pour les voir et pour admirer en même temps un fort beau point de vue sur les environs de Londres. Après souper, j'allai au lit. Ces deux derniers jours, ma femme a beaucoup souffert de ses clous, toujours au même endroit, ce qui la gêne énormément. A midi, j'ai accordé mon luth (Dieu me pardonne !) auquel je n'avais pas touché depuis bien longtemps."
(P. 62).

Notes

(1) La signature de ce major figurait parmi celles marquant la condamnation à mort du roi.
Né en 1600, Charles 1er fut porté sur le trône d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande en 1625.

(2) Le 30 janvier 1649.

(3) John Carew, autre régicide.

(4) Axtel commandait la garde au cours du procès en Haute-Cour du roi. Hacker exerça la même charge lors de l'exécution de Charles 1er.

(5) Pour parcourir Londres frappée par la peste en 1665 et décrite par Samuel Pepys, retrouvez le blog de Dominique, "à sauts et à gambades", page du 20 avril dernier. Cliquer : ICI.


(5) Signature de S. Pepys (DR).
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jeudi 20 octobre 2011

P. 82. Dans cet hôpital...

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(Ph. JEA/DR).


Dans cet hôpital

chaque horloge est amputée

d’une aiguille au moins

c’est grave, docteur ?



Sur les murs qui amochent la ville

la prose des affiches proclame

la proscription des mendiants

c’est glorieux, M. le Maire ?



Un oiseau incorrigible

incrédule se laisse porter

par un vent pourtant incurable

c’est déroutant, l’épouvantail ?



Un soleil sans-culotte

mais son chiffon rouge autour du cou

chante comme on s'aime

c’est sans lendemain, l’artiste ?



Sur l'écran du cinéma empyrée

un film fil-de-fériste

plus en noir qu’en blanc

c’est fini, le public ?



Dans la poche de la rivière

poignardée

un peu de pluie

c’est un point d'interrogation, la mémoire ?


Entrée de ville bannissant la mendicité (Ph. JEA/DR).

Un peu de poésie dans ce monde brut de décoffrage ? Cliquer : ICI.


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lundi 17 octobre 2011

P. 81. "Les Géants", film de Bouli Lanners

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Affiche sur le Site du film, cliquer ICI. 

Synopsis : 

- "C’est l’été, Zak et Seth se retrouvent seuls et sans argent dans leur maison de campagne. Les deux frères s’attendent encore une fois à passer des vacances de merde. Mais cette année-là, ils rencontrent Dany un autre ado du coin.
Ensemble, à un âge où tout est possible, ils vont commencer la grande et périlleuse aventure de leur vie." 

Bouli Lamers : 

- "En mettant tout dans la nature, j'avais la structure d'un conte. J'avais le loup, la sorcière, la fée, les chasseurs… C'était parfait pour parler de la naissance d'une amitié qui pallie une absence familiale. Et je me suis rendu compte que je me faisais ultra plaisir car j'adore tourner dans la campagne, être dans la rivière, avoir une logistique plus rude.
(…)
En fait, j'ai déjà pris une partie de ma pension entre 18 et 30 ans. Maintenant, je travaille. J'ai besoin que tout ça sorte et ça demande beaucoup d'implications professionnellement, humainement, au niveau de la santé, de la famille. Il arrivera un moment où j'aurai besoin de me remettre dans la rivière et de me laisser aller. Car la vie, c'est ça ! Dans mes films, j'exprime quelque chose de ma vie. Ensuite il faut vivre, et encore vivre. Le ciné n'est pas une fin en soi. C'est un outil d'expression. Je ne vais pas vivre pour un outil ! Je vis car j'aime vivre. Donc, à un moment donné, je me remettrai dans une barque…"
(Interview par Fabienne Bradfer, Le Soir, 12 octobre 2011). 

Louis Danvers : 

- "Résolument fictionnel, le cinéma de Lanners a cette vertu quasi documentaire, que le cinéaste reconnaît en affirmant aimer "puiser dans une réalité qui sera toujours plus forte que ce qu'on a pu imaginer".
(levif.be, 16 novembre 2010). 

7sur7 : 

- "Bouli Lanners nous offre dans "Les Géants" une Belgique revue et corrigée: l'étendue des paysages ardennais impressionne et émeut. Les routes infinies qui s'ouvrent devant nos yeux donnent l'impression que tout est possible, le meilleur comme le pire.
Le véritable coup de coeur du film, c'est ce trio d'enfants qui fonctionne merveilleusement bien. Ils ne connaissaient pas et on découvre que leur cheminement à l'écran est proche de leur histoire dans la vie: non pas qu'ils aient vécu des tas de galères sur le tournage de Bouli... On parle ici de l'amitié qui se crée, des affinités qu'on se découvre, de l'intimité qui rapproche, de la force qui semble les animer quand ils sont ensemble."
(12 octobre 2011).

Bouli Lanners au Festival International du Film Francophone à Namur. Photo de Christian Delwiche (1).

Ecrans Géants :
en Belgique depuis le 12 octobre et
en France à partir du 2 novembre

Fernand Denis : 

- "Si les Dardenne ont inscrit Seraing sur le planisphère du cinéma et Jaco van Dormael le quartier du logis à Boitsfort, Bouli c’est toute la Wallonie (2). Une Wallonie en scope, parfois belle à tomber, comme les Wallons ne l’ont jamais regardée. "L’image est mon premier moyen d’expression. Mais je ne suis pas un théoricien, un intellectuel. Mon langage, c’est l’image, depuis toujours. Regarder est terriblement important dans mes films. Je veux qu’il y ait à regarder, que l’image raconte. Il y a une grande part d’instinct et je ne veux pas essayer de savoir. Je sens que c’est cela. Je ne sais pas expliquer mon travail. Les personnages dans ce cadre-là, ça me dit quelque chose. Je vois leur univers, ce qui s’est passé dans leur vie. Et si je le vois, j’espère que le spectateur le verra aussi. Ou autre chose, mais qui va dans le même sens."
(La Libre Belgique, 24 septembre 2011). 

Françoise-Marie Santucci : 

- "En amateur de grands espaces canadiens ou américains, Bouli déteste ce qu’il appelle « les films d’appartement » mais prend un plaisir immense (autant pour le défi technique qu’intellectuel) à « tourner sur des confettis », avec des angles si serrés qu’on arrive à croire au fleuve sauvage quand, un mètre hors-cadre, se dresse un camping. Bouli fait la liste des protagonistes des Géants : « Il y a ces trois enfants sans parents qui vont dans les bois ; un méchant ; un très méchant ; des voisins ; un nain de jardin ; une fée. » La fée, Marthe Keller, est le seul visage connu d’un casting dont les héros, Zak, Seth et Danny, vivent le temps d’un été leur Into The Wild à eux."
(Libération, 7 mai 2011). 

Fabienne Bradfer : 

- "Parler de ce moment incroyable où l'on sort de l'enfance, où l'on bascule dans le monde des géants. Et ce sans allonger les clichés. Raconter l'errance de trois enfants sauvages tout en traduisant subtilement les violences, les précarités et les manques de la vie. Bouli Lanners relève joliment ces défis en filmant avec une infinie tendresse trois gamins un peu largués et qui vont se la jouer mi-Far West mi-jungle dans la nature wallonne et découvrir que l'amitié, c'est vraiment plus fort que tout. De Cannes au Festival de Namur (3), les jurys ont craqué pour ce conte moderne sur l'errance adolescente qui parle d'absence parentale et de manque d'affection.  Sans doute ont-ils été conquis par le cinéma habité, généreux, à la fois drôle et dur, réaliste et pictural qu'est celui de Bouli Lanners. Sans doute ont-ils aussi succombé aux trois bouilles d'atmosphère - Zacharie Chasseriaud, Martin Nissen et Paul Bartel - qui donnent au film sa chair, sa drôlerie, son émotion, sa justesse et ce petit plus de vérité magique."
(Le Soir, 12 octobre 2011).

Les trois géants : Zacharie Chasseriaud, Martin Nissen et Paul Bartel (DR). 

Marion Pasquier : 

- "Les thèmes des Géants ne frappent pas par leur originalité : sortie de l'enfance, adolescence comme âge où tout est possible, confrontation de l'innocence au monde abject des adultes, parcours initiatique... La forme à laquelle recourt Bouli Lanners permet cependant d'éviter le cliché. Nous sommes ici dans le conte : enfants sans parents, nature, cabanes abandonnées, forêt, rivière... véhiculent un sentiment d'intemporalité. L'atypicité des adultes rencontrés (un vendeur de haschisch complètement fou, une brute épaisse, la mère mutique d'une handicapée mentale...) permet aussi de faire d'eux autre chose que de simples obstacles à la liberté adolescente. Le monde des Géants est glauque mais l'humour met judicieusement tout tragique à distance. La tonalité varie en fonction des péripéties, les scènes sont tantôt drôles, violentes, émouvantes..."
(Critikat, mai 2011). 

Barbara Théate : 

- "Bouli Lanners n’a pas voulu signer une chronique sociale, à la manière des frères Dardenne. « Les Géants », c’est un peu l’histoire des Trois Petits Cochons, chassés de maison en maison. Le méchant frère est le loup, la femme du dealer la sorcière, et la dame au grand cœur qui les héberge leur bonne fée". C’est aussi un peu son histoire à lui. "J’ai fait une grosse crise d’adolescence et j’ai fugué à la campagne. J’ai vécu une longue période de rébellion. Il faut dire que c’est un âge où tout semble possible : la disparition du monde dans lequel on vit, la construction d’un futur idéal… On a l’impression que l’horizon est totalement dégagé, qu’on peut prendre sans danger n’importe quelle direction. La réalité nous assomme quand on devient adulte. Voilà pourquoi, à 46 ans, je fais tout pour rester un adolescent dans la tête !"
(JDD, 22 mai 2011). 

Gaëlle Bouché : 

- "Gauches et innocents, les trois garçons sont loin d’être des foudres de guerre. Les solutions qu’ils imaginent pour sortir de la précarité sont certes originales, mais peu concluantes. Au contraire elles obligent nos trois héros à fuir en pleine campagne dans l’espoir de trouver un nouveau refuge. Et c’est ici que réside toute la beauté du film. Loin de la tragédie sociale, “Les géants” porte un regard tendre sur la maladresse des adolescents. La mise en scène, presque paternelle, souligne affectueusement leur moindre bourde et les anecdotes qui ponctuent leurs aventures sont aussi touchantes que drôles. Un humour raffiné, qui sait jouer du moindre trait de caractère."
(Abusdecine, annonçant la sortie en France le 2 novembre 2011).

Ils quittent leur enfance mais quelle enfance ? (DR). 

Anne Feuillère : 

- "Dans Les Géants, les figures blanches et noires ne s’affrontent pas vraiment. Elles vivent, chacune de leurs côtés, voisinent et s’ignorent. Ce sont les enfants qui vont et viennent entre elles. Et l’innocence, à s’y frotter, vacille d’être trop légère, avant de tomber à l’eau, comme la cabane, dernier refuge qui s’écroulera dans un marais puant. S’ils sont bien victimes, à mains égards, du monde des adultes et de sa violence, Zach, Seth et Danny ne sont pas pour autant ni tout à fait inconscients ni tout à fait innocents. L’enjeu des "Géants" est ailleurs. Dans le mouvement, le trajet des garçons, qu’ils sortent de la forêt profonde, qu’ils sortent de l’enfance. Et cela passe par le choix, qui implique justement la responsabilité, la conscience, la liberté. À ce prix."
(cinergie.be, 8 octobre 2011). 

NOTES : 

(1) Photo publiée sur le site Bia Bouquet de Christian Delwiche et reprise ici avec son autorisation. Retrouver aussi la page 40 de ce blog.

(2) Présentation de son film précédent, Eldorado, sur le premier blog Mo(t)saïques, cliquer : ICI.

(3)  Les Géants se sont vu attribuer le Bayard d’Or du Meilleur Comédien pour Zacharie Chasseriaud, Martin Nissen et Paul Bartel ainsi que le Bayard d’Or de la Meilleure Photographie pour Jean-Paul De Zaeytijd au 26ème Festival du Film Francophone de Namur.
Le film avait déjà reçu le premier prix du Festival de Dieppe ainsi que les prix CICAE et SACD à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes 2011. 

Bande annonce :



 
 

jeudi 13 octobre 2011

P. 80. Photos d'enseignes, au patrimoine de notre humble humanité...

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Il en est pour ramasser à quatre pattes leurs champignons
à quatre pas des centrales nucléaires,
pour tenter d’acheter le pas de porte d'un horizon,
pour perdre leurs pas mais ce n’est pas grave
car ils marchaient sur des pas de parade,
pour danser le soir à pas de loups
en attendant que des étoiles tombent de fatigue,
ou plus louche encore
des passagers bardés de passeports
pour apprendre un pas de tango
sur un cargo tanguant 
aussi langoureusement que dangereusement,
des revenants (sur leurs pas)
pour tourner le dos à demain,
des faussaires ne laissant que des traces de faux pas,

personnellement et pourquoi pas
et ce n’est pas nouveau,
je préfère tomber admiratif devant les panneaux
de quelques artisans aristocratiques 


Bistrot à Meillan :

(Ph. JEA/DR). 

Boucherie à Hirson :

(Ph. JEA/DR). 

Boulangerie à Aigueperse :

(Ph. JEA/DR). 

Brocante à Noyers-sur-Serein :

(Ph. JEA/DR). 

Café à Jaligny :

(Ph. JEA/DR).

Horlogerie à Mane :

(Ph. JEA/DR).

Hôtel dans le Haut-Beaujolais :

(Ph. JEA/DR). 

Librairie à Fécamp :

(Ph. JEA/DR). 

Pâtisserie à Simiane-la-Rotonde :

(Ph. JEA/DR). 

Pêche, Tabac, Cadeaux, Loterie nationale en Sologne bourbonnaise :

(Ph. JEA/DR). 

Puces à Issigeac :


(Ph. JEA/DR).

Relais aux Bidons :

(Ph. JEA/DR). 

Stores, Moustiquaires, Fermetures à Céreste :

(Ph. JEA/DR).

C'est en 1942 et à Céreste que René Char entra en résistance armée sous le pseudo d'Alexandre. Lors de la libération, il y dirigeait le secteur "atterrissages-parachutages" pour la zone de la Durance.
A Céreste, il rédigea les "Feuillets d'Hypnos", dont voici le 87e :

- "... Vous veillerez à ce que la jeune équipe affectée au terrain ne se laisse pas entraîner à apparaître trop souvent dans les rues de Duranceville. Filles et cafés dangereux plus d’une minute. Cependant ne tirez pas trop sur la bride. Je ne veux pas de mouchard dans l’équipe. Hors du réseau, qu’on ne communique pas. Stoppez vantardise. Vérifiez à deux sources corps renseignements. Tenez compte de cinquante pour cent romanesque dans la plupart des cas. Apprenez à vos hommes à prêter attention, à savoir poser l’arithmétique des situations. Rassemblez les rumeurs et faites synthèse. Point de chute et boîte à lettres chez l’ami des blés. Eventualité opération Waffen, camp des étrangers, les Mées, avec débordement sur juifs et résistance. Républicains espagnols très en danger. Urgent que vous les préveniez. Quant à vous, évitez le combat. Homodépôt sacré. Si alerte, dispersez-vous. Sauf pour délivrer camarade capturé, ne donnez jamais à l’ennemi signe d’existence. Interceptez suspects. Je fais confiance à votre discernement. Le camp ne sera jamais montré. Il n’existe pas de camp, mais des charbonnières qui ne fument pas. Aucun linge d’étendu au passage des avions, et tous les hommes sous les arbres et dans les taillis. Personne ne viendra vous voir de ma part, l’ami des blés et le Nageur exceptés. Avec les hommes de l’équipe soyez rigoureux et attentionné. Amitié ouate discipline. Dans le travail, faites toujours quelques kilos de plus que chacun, sans en tirer orgueil. Mangez et fumez visiblement moins qu’eux. N’en préférez aucun à un autre. N’admettez qu’un mensonge improvisé et gratuit. Qu’ils ne s’appellent pas de loin. Qu’ils tiennent leur corps et leur literie propres. Qu’ils apprennent à chanter bas et à ne pas siffler d’air obsédant, à dire telle qu’elle s’offre la vérité. La nuit, qu’il marche en bordure des sentiers. Suggérez les précautions; laissez-leur le mérite de les découvrir. Emulation excellente. Contrariez les habitudes monotones. Inspirez celles que vous ne voulez pas trop voir mourir. Enfin, aimez au même moment qu’eux les êtres qu’ils aiment. Additionnez, ne divisez pas. Tout va bien ici. Affection. HYPNOS."

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