MO(T)SAIQUES 2

"Et vers midi
Des gens se réjouiront d'être réunis là
Qui ne se seront jamais connus et qui ne savent
Les uns des autres que ceci : qu'il faudra s'habiller
Comme pour une fête et aller dans la nuit ..."

Milosz

lundi 20 août 2012

P. 174. 18 août 1705 : J-F Rebel rejoint les 24 violons du Roi

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Violon du Roy. Gravure (1688) de Nicolas Arnault. Musée du Carnavalet (DR).

L’Express

- "Jean-Féry Rebel, ou Jean-Ferry Rebel, (18 avril 1666 - 2 janvier 1747) est un violoniste et compositeur français de l'époque baroque. Il était fils d'un chanteur, et fut remarqué pour ses dons, dès huit ans, par Lully, auquel il doit sa formation. Sa soeur, une chanteuse, épousa le compositeur Michel-Richard Delalande. En 1705, il fut recruté parmi les Vingt-quatre Violons du Roi ; il devint plus tard maître de musique à l' Académie royale de Musique (1716), puis compositeur de la Chambre du roi en 1726, enfin maître de musique de l'Académie Française en 1742."

A partir du 18 août 1705, Jean-Fery Rebel devient l'un des « 24 Violons du Roi »


Centre de musique baroque de Versailles

- "Les Vingt-quatre Violons du Roi, appelés également La Grande Bande, ou encore Les Violons Ordinaires de la Chambre du Roi est une formation musicale qui, de 1577 jusqu'à sa suppression par un édit de 1761, fut destinée aux divertissements et cérémonies officielles de la Cour de France. Renforcée à de maintes reprises par les 12 Grands Hautbois de la Grande Écurie, elle est le premier exemple d'orchestre formel, constitué sur la base d'un groupe d'instruments à cordes (…).
L’Orchestre était de tous les divertissements donnés à la Cour - bals, ballets, concerts - et de toutes les cérémonies officielles, réception de souverains, pompes funèbres... Il se joignait au besoin à l'orchestre de l'opéra. D’après Voltaire dans Le Siècle de Louis XIV, les Vingt-quatre Violons « étaient toute la musique de la France ». Ils ne jouissaient pas moins d’une vaste réputation à l’étranger, grâce aux recueils de danses françaises, notamment en Allemagne, en Suède, et en Angleterre."

Camille Larbey


- "A la différence des autres grands ensembles étrangers, celui-ci a pour particularité de rassembler non pas quatre, mais cinq familles de violons. Chacune a une dimension et un timbre spécifiques.
Mais la montée en puissance au XVIIIe siècle de l’orchestre italien – à quatre parties et qui joue notamment sur des altos, violoncelles et contrebasses – détrône les 24 Violons du roi. L’orchestre est supprimé en 1761. Avec lui disparaissent la plupart de ses instruments d’époque.
(Rue 89, 8 juillet 2012).

1761 : les 24 violons se taisent.
2012 : le Centre de musique baroque de Versailles les fait renaître dans toute leur splendeur.





Mais revenons à Jean-Féry Rebel.
Les Eléments marquent dès leur première audition. Et persistent ensuite à troubler, à questionner, à revenir aux quatre fondamentaux que sont l'eau, l'air, le feu, la terre. Au départ d'un Chaos extraordinaire.

Catherine Cessac

- "Musicien quelque peu oublié de nos jours, en retrait des grandes figures d'André Campra, de Jean-Philippe Rameau, ou encore de son beau-frère, Michel-Richard de Lalande, Jean-Féry Rebel mérite cependant une meilleure place. Ses multiples activités au sein des illustres institutions que furent la Musique de la Chambre du Roi et l'Académie Royale de Musique, son appartenance à une dynastie de musiciens qui s'étendit sur trois générations, ses compositions enfin, notamment dans le domaine de la sonate (dont il fut l'un des premiers représentants en France et sûrement le plus brillant) et de la symphonie de danse (Les élémens constituant la dernière œuvre du compositeur fut considérée en son temps et toujours aujourd'hui comme un chef-d'œuvre) en font une figure majeure de l'histoire de la musique française de la première moitié du XVIIIe siècle."

Marie-Geneviève Massé

- "Rebel dépasse le concept de l’esthétique de l’imitation en ouvrant la voie à la musique pure par un langage audacieux de l’harmonie. Son génie se révèle aussi dans l’agencement des pièces, des effets de juxtaposition, des rythmes exceptionnels et un jeu infini dans la variété des sonorités."
(Compagnie de l’Eventail).

Médiathèque


- "Jean-Féry (…) revient à la composition à 73 ans avec Les Eléments, « symphonie » considérée comme l’une des plus abouties du genre au XVIIIème siècle. Cette suite de danses et de morceaux de fantaisie fait évoluer les motifs de la Terre, de l’Eau, du Feu et de l’Air dans des combinaisons instrumentales changeantes et colorées. Un impressionnant prologue non dansé, Le Chaos, y est joint quelques mois plus tard. Son langage harmonique et sa conception générale ne cessent de nous surprendre aujourd’hui encore.

Seule une soixantaine d’œuvres de Jean-Féry Rebel nous sont parvenues, dont aucune de l’époque où il était compositeur de la Chambre du Roi. Il lègue à la postérité une image de novateur, et l’on a tôt fait d’oublier son unique et peu originale tragédie lyrique Ulysse, composée à 37 ans. Jean-Féry Rebel se décharge progressivement de ses nombreuses responsabilités sur son fils aîné François grâce à la survivance de ses charges, tout en gardant son poste parmi les « Vingt-Quatre ». Il est inhumé à plus de 80 ans aux côtés du jardinier Le Nôtre, de Racine et de Thomas Corneille."
(Cité de la Musique).


Avertissement manuscrit de J-F Rebel (Mont. JEA/DR).

Avertissement aux Eléments

- "Les Elemens peints par la danse et par la Musique m’ont paru susceptibles d’une variété agréable, tant par rapport aux differens genres de musique, que par raport aux habits et aux pas des danseurs.
L’introduction a cette symphonie étoit naturelle ; C’éstoit Le Chaos même, cette confusion qui régnoit entre Les Elemens avant L’instant ou, assujettis a des loix invariables, ils ont pris la place qui leur est prescrite dans L’ordre de la Nature.
Pour désigner, dans cette confusion, chaque Element en particulier je me suis asservi aux conventions les plus reçues.
La Basse exprime la Terre par ses notes liées ensemble et qui se jouent par secousses ; Les Flutes par des traits de chant qui montent et qui descendent imitent le cours et le murmure de L’eau ; L’air est peint par des tenües suivies de cadences que forment les petites flutes ; Enfin les Violons par des traits vifs et brillans réprésentent l’activité du feu.
Ces caracteres distinctifs des Elemens se font reconnoître, séparés ou confondus,en tout ou partie, dans diverses reprises que J’appelle du nom de Chaos, et qui marquent les efforts que font les uns des autres. Au 7e Chaos ces efforts diminuent a proportion que l’entier débrouillement approche.
Cette premiere idée m’a mené plus loin. J’ai osé entreprendre de joindre a l’idée de la confusion des Elemens celle de la confusion de L’harmonie. J’ai hazardé de faire entendre dabord tous les sons mélés ensemble, ou plutost toutes les notes de l’Octave réunies dans un seul son. Ces notes se développent ensuite, en montant a L’unisson dans la progression qui leur est naturelle, et, après une Dissonance, on entend L’accord parfait.
J’ai crû enfin que ce seroit rendre encore mieux Le Cahos de l’harmonie si, en me promenant dans les differents Cahos sur differentes cordes, Je pouvois, sans choquer l’oreille, rendre le ton final indécis, jusqu’a ce qu’il revint indéterminé au moment du débrouillement."

Le Chaos

- "Cette pièce visionnaire se situe à la charnière de deux époques, entre musique imitative et musique pure. On pourrait alors prêter à Rebel les propos de Rameau, jugeant que l’harmonie « est l’unique base de la musique, et le principe de ses plus grands effets ». Rebel choisit ainsi ses accords et leur agencement de façon à ce qu’ils expriment le chaos par eux-mêmes, sans recours à la voix ou à un décor."
(Médiathèque, la Musique de Versailles).


Version Musica Antiqua Köln sous la direction de Reinhard Goebel.


Christopher Hogwood à la tête de l'Academy of Ancient Music.

A lire

- Cessac Catherine, Jean-Féry Rebel, « Sciences de la musique », CNRS Éditions, Paris 2007, 192 p.

Et cette perle de culture, trouvée sur
Concerts.fr :

- "Pour ne plus rien manquer concernant Jean-Féry Rebel, recevez gratuitement son actualité dans votre boîte mail : ses passages à la télé, au cinéma, en spectacle ou en concert."

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17 commentaires:

  1. Bonjour JEA, voilà un retour des plus plaisant, en musique de moi inconnue.
    Fermer les volets de jour et écouter, dans une très relative fraîcheur, ce Cahos tentateur.
    Bonne journée à vous, merci.

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    1. Chère Colo,

      En préparant cette page, que n'y ai-je intégré une vidéo des grandes eaux à Versailles ? Ou, pour saluer votre -trop - bref séjour dans le Royaume, les ballets des ombres sur les canaux de Bruges...


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  2. Il y a quelques belles musiciennes dans l'orchestre... En coupant le son c'est agréable...

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    1. mes excuses de ne pas avoir préparé des jumelles de concert pour votre visite...

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  3. il y a un très bon (mais au fond peut être épuisé) petit livre chez Que sais-je sur les violons du roi - et les éléments : j'aime, sans couper le son

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    1. chère Brigitte,

      il est trop tôt et il fait trop chaud pour que vous frémissiez devant une de ces provocs qui sont une spécialité vinossienne...

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  4. La citation de cette incroyable perle de culture m'a beaucoup amusée !

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    1. nous apprendrons bientôt que J-F Rebel a un compte Facebook...

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  5. Quel dommage que je ne puisse toujours pas avoir ni le son ni l'image ! Très intéressante cette théorie du "chaos de l'harmonie".

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    1. les paradoxes élargissent les horizons des réflexions...

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  6. Voilà une musique très vive et moderne... surprenante en effet et j'adore "l'entier débrouillement qui approche", merci JEA pour cette surprise !

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    1. en effet, chère MH, pas de carcan ni de cadran scolaire pour cette musique sidérante et porteuse d'une révolution sidérale...

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  7. Peut-être peu sensible à l'art musical (hormis l'opéra), le petit Duc ne parle presque jamais de la musique à Versailles dans ses Mémoires...

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  8. Sans doute peu sensible à l'art musical (hormis de l'opéra), le Petit Duc ne parle presque jamais de la musique à Versailles dans ses Mémoires. Et encore moins des violons du Roi.

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    1. Peut-être serait-il instructif de consulter :
      - Himelfarb Hélène,
      Saint-Simon, Versailles, les arts de cour,
      textes réunis par Philippe Hourcade et Christophe Blanquie,
      Paris : Perrin, 2006. 530 p.

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  9. j'ai hâte d'avoir une connexion suffisante pour regarder et écouter vos vidéos.Ici dans les Alpes c'es très débit

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    1. toute ma sympathie d'autant que dans mon coin ardennais, le débit se fait au goutte à goutte...

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